Conseiller municipal, membre de l’exécutif territorial et président de l'Adec, Jean Zuccarelli a été désigné candidat aux élections législatives de juin prochain dans la première circonscription de Haute-Corse par les instances nationales du PRG et du PS. Mais, son investiture est décriée par les socialistes locaux. Le vice-président de la fédération PRG de Haute-Corse répond, pour Corsenet.infos, à ses détracteurs et joue l’union face aux divisions de la gauche. Il explique son ambition de mener deux campagnes parallèles : une présidentielle derrière François Hollande et une législative, qui s’annonce difficile face à un député sortant en pôle position et à des nationalistes en embuscade en vue des municipales de 2014.
- Vous venez d’être désigné comme candidat à l’élection législative pour le PS et le PRG. Mais, Laurent Croce, patron des socialistes de Haute-Corse, dit clairement que votre investiture est une grave erreur politique. Que lui répondez-vous ?
- Je peux comprendre la déception de Laurent Croce. Je le laisse libre de ses propos. Je ne vais pas les commenter davantage. Ce que je retiens, c’est que, d’une part, il met en garde contre la dispersion des voix et, d’autre part, il prône le rassemblement à gauche. Pour moi, il est important que ce rassemblement s’opère. J’appelle donc largement au rassemblement, pour les présidentielles derrière la candidature de François Hollande et, pour les législatives en Haute Corse, derrière les candidats d’ores et déjà entérinés par les instances nationales du PS et du PRG.
- Emmanuelle de Gentile estimait sa candidature légitime !
- La démarche d’Emmanuelle de Gentile est tout à fait légitime mais, aujourd’hui, nos partis ont choisi, non sans argument, tout de même. Dans le cadre d’un accord national, il faut bien qu’un certain nombre de circonscriptions soit confié au PRG et, s’il y a une circonscription dans laquelle le PRG est la force centrale à gauche, c’est bien la première circonscription de Haute-Corse.
- N’y-a-t-il pas un risque que le PS ne joue pas le jeu derrière vous ?
- Je ne le pense pas. Nous sommes des personnes responsables. Au regard des enjeux considérables des prochains scrutins, je ne doute pas que nous serons unis dans la bataille qui s’engagera dans les prochains mois. Je suis un optimiste. Je suis persuadé qu’au delà des propos abrupts tenus, Laurent Croce aura la volonté de s’engager complètement. Comment pourrait-il en être autrement ! Comment pourrait-il dissocier présidentielle et législative alors que les législatives visent à donner une majorité au président ! Nous devons travailler avec le PS pour l’organisation de la campagne présidentielle. Je crois qu’Emmanuelle de Gentile artage comme moi, l’ambition, avant toute chose et avant notre démarche personnelle, de faire gagner François Hollande. C’est la première étape. L’élection législative doit être vraiment comprise comme le deuxième acte de la présidentielle.
- Un autre conflit oppose votre père à François Tatti. N’y-a-t-il pas trop de conflits à gauche au moment où vous avez besoin d’une gauche unie ?
- Il ne faut pas toujours exagérer les conflits. Les questions, posées par les uns et les autres, sont de nature très différentes. Il faut se garder d’une vision un peu simpliste. Au delà des propos tenus par les uns et les autres, nous partageons aujourd’hui la même majorité municipale à Bastia, la même majorité à l’Assemblée et à l’exécutif. Avec François Tatti et Emmanuelle de Gentile, nous sommes assis sur les mêmes bancs et nous portons ensemble les mêmes politiques au niveau régional. Même au niveau national, nos convictions sont identiques. Aussi suis-je confiant dans le soutien qui pourrait m’être apporté par l’ensemble des élus des deux formations PS et PRG.
- Comment pouvez-vous être sûr que cette majorité s’unira derrière vous pour votre campagne ?
- Je le crois. Et nous devons créer les conditions entre nous pour que cette union soit la plus forte possible et que toutes les énergies aillent dans le sens du soutien aux candidats. Au delà des ambitions naturelles et légitimes de chacun par rapport à des mandats, c’est bien une démarche de victoire de la gauche et d’alternance que nous souhaitons proposer au niveau national et qui devra se traduire par une victoire locale aux législatives. Je suis convaincu que nous serons tous ensemble. En tous cas, il est de notre responsabilité à chacun de faire en sorte que ce climat de bonne entente et de cohésion prévale.
- Avez-vous déjà choisi votre suppléant ? Y aura-t-il parité ?
- Non, je n’ai pas encore décidé. Le Comité directeur du PRG, qui m’a investi, m’a délégué ce choix. Il va falloir maintenant décider selon différents critères. Il n’y a pas d’obligation de parité dans le scrutin des législatives. Toutefois, cela n’écarte pas un suppléant féminin.
- Sera-ce quelqu’un du PRG ou faudra-t-il qu’il soit issu du PS ?
- Il n’y a pas d’accord. L’accord national, qui a conduit à l’investiture d’un candidat PRG avec le soutien du PS, ne prévoit pas de suppléance PS d’office. Cela ne l’exclut pas, toutes les hypothèses sont ouvertes : PRG ou PS, homme ou femme, rural ou région du Grand Bastia, tout ceci doit être examiné dans les prochaines semaines. Nous confirmerons un nom, courant du mois de janvier ou, au plus tard, début février.
- C’est votre première élection uninominale. Vous serez donc, pour la première fois, seul, en première ligne.
- C’est vrai, ce sera nouveau. Il y aura très certainement la part de découverte inhérente à cette expérience nouvelle, mais, en même temps, j’ai été aux côtés des candidats tête de liste dans
les précédentes élections, principalement les deux dernières, qui se sont soldées par des victoires et où j’ai pris une part active.
- Certains disent que vous êtes jeune en politique ?
- Mon premier mandat remonte à 2008 en tant que conseiller municipal à Bastia. Depuis mon plus jeune âge, je suivais les engagements politiques de mon père et de mon grand-père mais, à une certaine distance, car j’étais occupé professionnellement. Au milieu des années 2000, j’ai amorcé un virage en m’engageant de manière plus importante. Ces dernières années, j’ai essayé de concilier ma carrière professionnelle et mon mandat politique. Aujourd’hui, je suis arrivé à un stade où je me dois de me consacrer entièrement, à plein temps, à mes mandats et à cette campagne qui s’annonce et mettre entre parenthèse ma carrière professionnelle.
- Comment appréhendez-vous cette campagne ?
- J’aborde le scrutin avec sérénité, confiance et espoir de pouvoir l’emporter même si le combat sera difficile et loin d’être gagné. Mais je crois fortement que, si nous menons une bonne campagne et que nous sommes convaincants, nous pourrons l’emporter.
- Quels thèmes allez-vous privilégier ?
- L’actualité nous oblige à adapter le discours à certaines urgences, certains développements, certains sujets qui prennent un relief particulier, notamment la crise et ses impacts budgétaires. Il faudra apporter des réponses aux questions principales que les électeurs pourront se poser.
- Votre discours sera-t-il axé sur l’économie ?
- Oui. La campagne présidentielle donnera le ton. La communication se fera à plusieurs niveaux. D’abord au niveau national, par rapport à l’objet premier de cette législative qui est de donner une majorité au Président de la République et au gouvernement. Nous parlerons de tout ce qui touche à l’alternance en dressant le bilan de l’action de Nicolas Sarkozy depuis cinq ans et plus globalement de la droite depuis 2002 et en défendant les réponses alternatives proposée par la gauche. Ensuite, nous ne manquerons pas de donner aux propositions nationales une consistance régionale par rapport aux questions qui se posent à la Corse. Notamment, celles touchant aux adaptations législatives et règlementaires qui devront être portées par le parlementaire, le moment venu. Enfin, en tant que représentant d’une circonscription, le rôle d’un député est d’œuvrer par rapport à des projets locaux, s’investir, interpeller les ministres sur des propositions de lois, mêmes nationales, mais qui vont dans l’intérêt du territoire.
- Le fait que vous soyez président de l’Adec et en charge de plusieurs dossiers importants sera-t-il un atout ?
- Les mandats, que j’ai la chance d’exercer, me donnent une certaine expérience et crédibilité pour pouvoir prétendre à des fonctions nationales. Ils vont m’aider à formuler des propositions
personnelles en prise avec la réalité de notre territoire, notamment dans le champ économique, de la formation, des nouvelles technologies… Autant de délégations que je peux exercer à la région
et qui me donnent à connaître un certain nombre de dossiers importants et pour lesquels je pourrais apporter une contribution réelle.
- Pour l’instant, votre seul adversaire déclaré est le député sortant, Sauveur Gandolfi-Scheit, très présent médiatiquement et qui jouit d’un bon bilan. Comment allez-vous l’affronter
?
- On peut en effet reconnaître à Mr Gandolfi-Scheit une grande capacité à communiquer. Je suis beaucoup plus réservé sur son bilan. Il y a parfois un décalage entre ses paroles et sa contribution réelle à l’avancement d’un certain nombre de dossiers sur lesquels il s’est positionné mais où souvent les solutions étaient apportées par d’autres. Je prendrais l’exemple récent du stade de Furiani, il y en a d’autres. C’est néanmoins un adversaire très sérieux. C’est le député sortant qui l’a emporté en 2007 sur une victoire assez large. Même si nous sommes dans un contexte différent, je ne mésestime pas la difficulté du combat et du débat que je devrais mener avec lui et, peut-être, avec d’autres.
- Justement, se profile un troisième adversaire potentiel, Gilles Simeoni avec un autre enjeu, celui des municipales, et des sujets très locaux comme la langue corse… Ne va-t-il pas vous obliger à axer votre campagne sur la problématique locale ?
- D’abord, je ne sais pas quelles sont les intentions de Gilles Simeoni. Je constate que, pour le moment, il n’a pas encore pris de décision. Attendons de savoir s’il sera présent directement ou non. Je pense toutefois que les thématiques nationales seront prégnantes car le rôle du député est de voter les lois. Peut-être que Gilles Simeoni ou son représentant essaieront de venir sur d’autres terrains mais ils ne pourront pas éluder le contexte national. Il leur faudra d’abord se positionner et répondre à la première question : voulez-vous continuer sur cinq années de Nicolas Sarkozy ou pas ? Il leur sera difficile d’éviter ce débat. Qu’il y ait ensuite des réalités locales par rapport à des sujets qui intéressent la vie de nos concitoyens, je ne les évacuerais pas, ils feront partie de la campagne.
- Vous attendrez donc que les nationalistes entrent en campagne pour aborder ces sujets locaux ?
- Non. Pas forcément. J’aurais l’occasion de m’exprimer sur des sujets plus spécifiquement locaux, indépendamment de l’entrée en campagne ou non de Gilles Simeoni. Je ne me positionne pas par
rapport à Gilles Simeoni ou d’autres. Je suis à l’exécutif de la région. Les élus de Femu a Corsica ont souvent tendance à accréditer l’idée que tout ce qui est mis en œuvre de positif, à leurs
yeux, est de leur initiative. Non, l’exécutif travaille et propose des actions dans la recherche, c’est vrai, d’un consensus très large au sein de l’assemblée, mais il ne faut pas inverser les
rôles. Tout ce qui est en train d’être fait sur un certain nombre de dossiers comme le foncier, la langue, etc., c’est d’abord l’action de l’exécutif régional. Tant mieux si nous sommes sur ces
terrains-là en accord avec la formation de Gilles Simeoni, mais c’est d’abord notre politique ! Pourquoi voudriez-vous que, en tant que candidat aux législatives, je ne sois pas aussi volontaire,
aussi actif et aussi clair dans ce que je voudrais faire que dans mes mandats exécutifs !
- Vous ne craignez pas le débat ?
- Je ne crains absolument pas le débat là-dessus, mais on ne pourra pas réduire le débat d’une élection législative aux seules questions, aussi importantes soient-elles, des dossiers strictement locaux. On ne peut pas nier que la politique nationale a un impact très fort sur la vie de chacun de nos concitoyens et c’est aussi au niveau de ces politiques nationales que nous devons agir. Il ne faudra pas se tromper de scrutin. On ne va pas refaire un scrutin territorial dans cette législative, il faudra d’abord élire un député.
Propos recueillis par N. M.
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