Le témoignage douloureux de la mère d'Ange Lekikot a été l'un des moments forts de ce deuxième jour d'audience. Les différents experts ont validé à la barre les déclarations de la prévenue, concernant le mode opératoire et l'état de la victime pendant le drame. L'audience s'est achevée avec l'examen des faits et l'audition des trois inculpés. Marie-Ange Luigi a demandé pardon pour son acte.
La troisième journée du procès de l'assassinat d'Ange Lekikot a été marquée par de forts moments d'émotion et les prises de bec répétées entre l'avocat général, Benoît Couzinet, et Me Gilles Simeoni, l'un des avocats de la défense.
Émotion d'abord lors de l'audition de l'expert balistique qui confirme que la balle mortelle est une cartouche à sanglier Brenneck, tirée à une distance approximative de 2,10 mètres. Il indique que, vue la distance de tir, les dégâts sur la victime auraient été identiques, quelque soit le projectile utilisé.
Un mode opératoire compatible
L'expert estime ensuite que la prévenue, handicapée d'une main, a pu tirer avec une arme déjà chargée, mais ne peut conclure si elle a visé ou non la victime. Il valide également le mode opératoire qu'elle a explicité en garde à vue.
Se pose ainsi la question, évoquée hier, de l'intention d'homicide. Me Gilles Simeoni demande, alors, à sa cliente de montrer sa main handicapée aux jurés. Celle-ci s'y refuse. Il faudra la forte insistance de son conseil pour qu'elle s'y résolve furtivement avant de s'effondrer en sanglots.
Le président Hoareau suspend la séance. "Son handicap, c'est le drame de sa vie. Elle le vit comme un traumatisme fort et caché. Elle a pu péter les plombs en entendant la victime se moquer d'elle, ce qui éloigne l'idée de préméditation", commente Me Jean-Michel Mariaggi, avocat du fils et de l'ex-mari de l'accusée.
La douleur d'une mère
Émotion également lors du témoignage du frère de la victime qui présente ce dernier sous un jour nouveau et bien plus favorable que celui brossé hier. Réfutant tout comportement violent et toute addiction à l'alcool d'Ange Lekikot, il martèle : " À aucun moment de sa vie, je ne l'ai vu frapper qui que ce soit. J'étais fier de lui. Il a eu des difficultés et il a su rebondir. Il adorait la vie. Tout allait bien pour lui. Il avait un appartement et plein de projets. Il travaillait avec moi à la ferronnerie. Il adorait son travail".
Émotion surtout lors de l'audition de Mme Mercier, la mère de la victime, qui, d'une voix entrecoupée de sanglots, va également s'attacher à gommer toutes les aspérités de son fils, renversant même les rôles. " Tout ce qu'on a dit sur mon fils est faux. Ce n'était pas quelqu'un de violent. Il avait peur de Mme Luigi qui l'avait frappé deux ou trois fois. Il ne disait rien. Il subissait. Il était faible. Même avec les garçons de la cité, il se faisait frapper". Elle raconte également " la douleur terrible" ressentie en découvrant son corps sans vie, son visage à moitié dévasté par la balle et insiste sur des griffures qu'il aurait eu sous le menton, suite aux coups que lui auraient donné l'accusée.
Un mort pour rien
Des affirmations des proches mises à mal par le médecin légiste qui exclut toute griffure et de l'expert biologique qui certifie que la victime était sous l'influence de l'alcool et du cannabis au moment du drame, corroborant les déclarations de l'accusée.
Le Président Hoareau lui demandant ce qu'elle attend de ce procès, la mère éplorée répond : " J'attends que Mme Luigi soit punie parce qu'elle a tué pour rien. Je suis quelqu'un de dialogue. Si Mme Luigi était venue me dire que mon fils battait sa fille, je serais intervenue car j'ai subi des violences ". Elle conclut : " La vie pour moi, c'est moche. On ne peut pas faire des choses comme ça".
L'examen tardif des faits
L'audience s'est achevée par l'examen des faits et l'audition des trois accusés qui n'ont rien apporté de nouveau. En premier lieu, celle d'Ange Campretti, le fils de l'accusée, poursuivi pour destruction de preuve, qui a aidé, après le drame, sa mère à se débarrasser de l'arme du crime. Agissant par amour filial et sous le coup de l'émotion, il lui aurait demander de se livrer à la police. Ensuite, Michel Campretti, son ex-mari, poursuivi pour non dénonciation, il ne réagit pas lorsque l'accusée lui téléphone quelques minutes après le drame pour l'avertir qu'elle a tué Ange Lekikot.
La demande de pardon
Enfin, celle de Marie-Ange Luigi, qui narre, à voix basse, l'enchaînement dramatique des faits et la montée en puissance de la tension qui éclatera dans le coup de feu fatal. L'accusée réaffirme qu'elle a pris le fusil pour se protéger, sans intention de tuer, qu'elle a appuyé sur la détente dans un geste de peur sans regarder.
Me Sébastien Sebastiani, avocat du frère de la victime, va habilement tenter de la pousser dans ses retranchements en lui posant, selon ses propres termes, "les mêmes questions que se pose la famille de la victime" et en la confrontant à ses propres déclarations.
"Je demande un grand pardon à la famille. Je regrette que ça se soit passé comme ça, mais je peux regarder la famille car je n'ai pas voulu le tuer", finira par dire l'accusée.
Le procès finit demain avec la poursuite de l'audition de l'accusée, les questions de l'avocat général et de la défense, le réquisitoire et les plaidoiries. Le verdict est attendu, tard en soirée.
N. M.
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