L’examen des motions a clôturé, comme à l’ordinaire, la session de l’Assemblée de Corse. La motion de la Commission des compétences législatives et règlementaires, dénonçant les méthodes de la justice d’exception, a suscité une polémique entre communistes et nationalistes. Elle a été renvoyée à l’unanimité devant la Commission mixte et la Commission Violence et sera remise en débat le mois prochain.
La gêne était déjà manifeste dans les couloirs de l’Assemblée de Corse. Personne, à droite, comme à gauche, n’avait envie d’en parler, et encore moins de la voter. Son renvoi devant la Commission
mixte et la Commission Violence était déjà acté avant même son examen, mardi matin, dans l’hémicycle.
La motion contre les procédures judiciaires dérogatoires au droit commun déposée par la Commission des compétences législatives et règlementaires, à la suite de l’audition de la section corse de
la Ligue des droits de l’Homme et d’un Collectif d’avocats, a suscité, comme on pouvait s’y attendre, la polémique.
Des dérives dangereuses
C’est que le sujet est de nature à rendre frileux les élus, déjà bien empêtrés, à la fin de l’année 2011, par la motion de François Tatti condamnant les assassinats commis en Corse, notamment la
revendication et la justification de l’un d’eux par le FLNC.
Dénonçant les méthodes brutales de la JIRS en Corse au niveau de l’interpellation des suspects, la Commission, présidée par Pierre Chaubon, stigmatise le recours systématique à des gardes à vue
inconsidérées, à des détentions abusives et à des témoignages sous X, le non-respect de la présomption d’innocence et le sentiment d’un traitement discriminatoire. Elle rappelle les règles de
base du procès équitable et le principe d’égalité des citoyens devant la loi.
Le Non de la gauche républicaine
Avant même l’ouverture de la session, François Tatti, avec les élus du groupe de « La Gauche République », avait averti qu’ils ne s’associeraient pas au vote de cette motion, l’Assemblée ayant si
manifestement boudé la sienne. « Comment l’Assemblée de Corse pourrait-elle demander une justice plus sereine, plus respectueuse de la présomption d’innocence et des droits de la défense, et
ne pas condamner les auteurs d’assassinats surtout quand ils prétendent se substituer à la Justice ? En dépit de quelques excès réels et condamnables, on ne peut comparer le sort des justiciables
de notre pays à celui des victimes d’exécutions sommaires ; dans ce cas il n’est question ni d’avocat, ni de garde à vue et encore moins de procès ! »
Un amendement hors sujet
Si au moment d’examiner la motion, tous les élus présents s’accordaient à son renvoi en Commission, une passe d’armes surprise a opposé Michel Stefani, élu du « groupe communiste et Front de
Gauche », et Jean Biancucci, élu de Femu a Corsica. L’élu communiste trouvant le contenu de la motion trop restrictif propose un amendement condamnant globalement toutes les formes de violence. «
Nous proposons un amendement pour que cette motion condamne toutes les formes de violence, tout ce qui s’apparente à des formes de justice de substitution, de règlements de compte et autres
violences », plaide Michel Stefani.
Amendement qui n’est pas du tout du goût des nationalistes, initiateurs de la motion, qui estiment la violence, dont parlent les communistes, hors sujet. « On a une proposition. On examine la
proposition. On ne doit pas sortir du cadre de cette proposition. On ne doit pas faire du chantage dans un espace démocratique. Nous sommes prêts à débattre de tout de manière sereine. Mais le
débat sur cette proposition de devait pas déraper sur la violence car ce sujet n’était pas à l’ordre du jour », rétorque Jean Biancucci, élu de Femu a Corsica.
La motion a, finalement, été renvoyée, à l’unanimité, devant la Commission mixte et la Commission Violence, qui devrait présenter ses conclusions devant l’Assemblée à la prochaine session prévue
les 29 et 30 mars prochains.
N. M.
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