Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées lundi soir au Palais des congrès d'Ajaccio poir exiger une justice sereine et équitable. Le moment fort de la soirée a été constitué par l'intervention de Alain Orsoni qui a laissé entendre qu'il poursuivrait "jusqu'au bout" sa grève de la faim pour obtenir la mise en liberté de son fils Guy en détention provisoire à Grasse où il a lui même cessé de s'alimenter le 13 février.
"Je suis libre. On ne me mettra pas sous perfusion, j'irai jusqu'au bout", a déclaré Alain Orsoni qui ne s'alimente plus depuis jours pour soutenir son fils Guy qui, mis en examen
dans trois affaires criminelles par un juge d'instruction de la Juridiction interrégionale spécialisée de Marseille, et qui clame son innocence aurait perdu selon ses proches 12 kg.
Christian Leca, le maire de Vero, village de la famille Orsoni, et un ami de la famille sont également en grève de la faim par solidarité. Gabriel-Xavier Culioli, a annoncé au cours de la même
soirée qu'il se joignait à eux.
"Seul moyen de se défendre et d’exprimer leur détresse"
Le débat de lundi soir au Palais des Congrès avait pour thème Pour une justice sereine et équitable, et répondait à l’appel de personnalités politiques, syndicalistes, associatives ou
venues à titre individuel. Mais tous étaient là pour faire émerger les dérives de la justice et notamment de la JIRS, prenant comme point de départ les grèves de la faim qui se multiplient
en corse (affaires Plasenzotti et Orsoni). Face à cette justice d’exception, elles restent à cette heure et pour les personnes concernées et dont la culpabilité n’a pas été démontrée
"le seul moyen de se défendre et d’exprimer leur détresse."
Les signataires de cet appel Jean Claude Acquaviva (artiste / A Filetta), François Alfonsi (député européen),
Léo Battesti (chef d’entreprise), François Casasoprana (adjoint au maire
d’Ajaccio, conseiller général), Jean Luc Chiappini (maire de Letia), Maria
Comiti (enseignante, syndicaliste), Petru D’orazio (professeur d’histoire Ajaccio), Tumasgiu
D’orazio (conseiller municipal d’Ajaccio), David Frau (associatif et syndicaliste), Marie Jeanne Nicoli (militante des droits de l’Homme), André Paccou (élu national LDH), Gaston
Pietri (prêtre), Elsa Renaut (enseignante, syndicaliste), ont, tour à tour, témoigné de leur expérience avec cette justice d’exception, rappelant même qu’il y a encore quelques années, celle-ci
s’appelait Cour de Sureté de l’Etat et qu’elle semblerait réapparaitre aujourd’hui en tant que Juridiction Inter Régionale Spécialisée (JIRS). D’autres signataires étaient simplement
présents pour s’associer à cette démarche en tant que défenseurs des principes, et dans ce cas, ceux de la justice, qui font la démocratie.
Les JIRS montrées du doigt
Les JIRS crées et mises en place en 2004, regroupent des magistrats du parquet et de l’instruction possédant une expérience en matière de lutte contre la criminalité organisée, la délinquance
financière dans des affaires présentant une grande complexité. Justifiant d’une investigation importante, elle est qualifié de dangereuse par ses contours flous où tout est permis. Les éléments
les plus contestables cités à mainte reprises par la tribune ont été l’éloignement de la Corse pour les interpellés, le recours aux témoignages anonymes, les difficultés d’accès à un avocat, la
systématisation des prélèvements ADN, le non-respect de la présomption d’innocence..
Léo Battestti ira plus loin soulignant que "nous n’avons plus à faire à des juges des avocats, mais des militants qui veulent rendre coups pour coups avec obligation de résultats qui bafoue
tous les droits."
Alain Orsoni affaibli par la grève de la faim qu’il a entamée par solidarité pour son fils a fait le déplacement. Pour lui, "la JIRS est une abomination, une bande organisée qui doit
être combattue au nom de la démocratie, et qui commet des crimes parce que personne ne la contrôle et qu’elle est au-dessus des lois." Au-delà du combat qu’il mène pour son fils et qui reste
sa priorité, il dit parler pour tous ceux qui sont confrontés à cette réalité, interpellant même le juge Choquet par le biais des médias : " Je connais son objectif, son absence totale de
sensibilité, son intransigeance, de moralité. Guy sera mis à l’hôpital à Paris et on le mettra sous perfusion. Mais moi on ne me mettra pas de force sous perf, je suis libre ! J’irai
jusqu’au bout ! Il n’est pas question de faire plier la justice comme on veut le laisser entendre, on veut la justice" rajoutera-t-il.
"Une broyeuse, une machine infernale"
Puis s’exprimeront Gabriel Cullioli, venu par solidarité se joindre aux grévistes, Frédérique Campana mère de Guy Orsoni, mais aussi son avocate, tout comme Camille Romani et Philippe Gatti. Tous
auront le même discours : "négation des droits de la défense, un Etat de droit insupportable et luttepour que la justice soit de nouveau le socle de notre démocratie."
Maitre Romani parle de la JIRS comme d’"une broyeuse, une machine infernale, qui privilégie toute les exceptions prévues par notre code de procédure pénale et de la convention des droits de
l’homme au détriment des principes : la garde à vue qui doit être une exception devient un principe, la présomption d’innocence doit être le principe elle devient l’exception, la détention doit
demeurer exceptionnelle elle devient le principe".
Il confirmera qu’il a été déposé par un avocat auprès de la cour de cassation une requête de suspicion légitime à l’encontre de ce magistrat.
Maitre Gatti, avocat de Guy Orsoni demande lui, au public, de taper sur internet association française des magistrats instructeurs pour lire les écrits du juge Choquet et où il écrit noir
sur blanc les incohérences de cette justice d’exception : collaboration entre justice et police, partage de résultats officieux…
Ces débats se sont terminés par la demande des signataires au public d’une mobilisation et d’une participation aux" actions contre ces dérives inquiétantes, contre cette juridiction aux
pratiques peu banales".
M. S.
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