Élu territorial de Femu a Corsica, membre de la Commission des compétences législatives et réglementaires, Gilles Simeoni a fait, du dossier des arrêtés Miot, un cheval de bataille de sa mandature. Il déposera, au nom de son groupe, une demande d'examen prioritaired’une motion sur le sujet à la prochaine session de la CTC, les 26 et 27 avril. Il explique, à Corse Net Infos, l’urgence d’obtenir le transfert de la compétence fiscale sous peine de voir les Corses spolier de leur patrimoine et accuse la classe politique traditionnelle de manquer de volonté politique pour mener ce combat.
- Pourquoi faites-vous une demande d'examen prioritaire ?
- A cause des contraintes du calendrier politique et électoral. La date couperet du 31 décembre 2012, prévue pour organiser le retour de la Corse au droit commun, s'approche à grands pas. Pour éviter ce retour, il faut qu’une loi, qui organise la prorogation de la période transitoire, soit votée très rapidement, c'est-à-dire au lendemain de l'élection présidentielle. Il faut que la CTC, en s'appuyant sur les délibérations et les décisions qu'elle a déjà prises, interpelle les candidats à la présidence de la République et ceux qui aspirent à devenir député de la Corse en leur demandant de s'engager pour que cette loi soit votée et entre en vigueur avant la date butoir.
- C’est la deuxième motion que vous présentez sur le sujet. Quand la première a-t-elle été votée ?
- Le combat pour le maintien du régime spécifique issu des arrêtés Miot, et plus largement pour un statut fiscal de la Corse, est un combat fondamental et historique du mouvement auquel nous appartenons, et qui est mené depuis plusieurs décennies. Les candidats de Femu a Corsica l’ont immédiatement, dès la campagne électorale des territoriales de mars 2010, érigé en priorité politique. Lorsque nous avons été élus, nous avons, bien sûr, tenu nos engagements et en avons fait un cheval de bataille. Nous avons déposé une première motion en octobre 2010, qui a été votée et a débouché sur une délibération.
- Cette première motion n’a pas fait l’unanimité ?
- Non. Certains groupes sont favorables à la suppression des arrêtés Miot. Le Front de gauche prétend que c’est un combat pour les nantis. Nous disons, démonstration à l’appui, que c’est un combat pour tous les Corses, quelque soit leur situation de fortune. Nous avons saisi la Commission des compétences législatives et règlementaires pour lancer une réflexion de fond sur le problème du statut fiscal. Dans le cadre de cette commission, présidée par Pierre Chaubon, nous avons fait des propositions.
- Quelles propositions ?
- La proposition de passer d’une logique de prorogations successives à une logique plus politique de transfert de la compétence fiscale, notamment en matière de droits de succession sur les transmissions d’immeubles à cause de décès. Nous disons qu’il faut, à toute force, rester dans un système d’exonération totale. Retourner au droit commun dans les conditions actuelles accélérerait le phénomène de dépossession et de spéculation.
- Pourquoi ?
- Tout simplement parce que retourner dans le droit commun, dans le contexte de hausse vertigineuse des prix de l’immobilier que connaît la Corse, signifie que la plupart des Corses, au moment d’hériter, devront payer des droits de succession tellement importants qu’ils seront obligés de vendre tout ou partie de leur patrimoine immobilier, donc cela accentuerait encore le phénomène de dilapidation du patrimoine individuel et collectif. Ce qui n’est pas envisageable. Nous avons obtenu que la CTC demande le transfert de la compétence fiscale en la matière et que l’on réfléchisse à une imposition modulée.
- C’est-à-dire ?
- Il n’est pas anormal ou illégitime que les gens, qui ont de gros patrimoines immobiliers, payent un impôt sur la transmission en cas de décès. Mais nous avons demandé et obtenu que cette ressource fiscale, qui viendrait dans les caisses de la CTC, soit une ressource fléchée, c’est-à-dire qu’elle soit nécessairement affectée à la politique du foncier et du logement. Il y a donc une cohérence d’ensemble de ce dispositif, sauf qu’il y a urgence et un véritable problème politique : le Conseil d’Etat, dans un avis qui ne nous a pas été communiqué, conclut au caractère inconstitutionnel de la demande de la CTC.
- Vous parlez d’une imposition modulée. Cela signifie que les Corses, qui ne payent rien aujourd’hui, paieront, demain, quelque chose ?
- C’est une logique normale de solidarité qu’il faut défendre. Mais passer de rien à quelque chose, décidée par la Corse et ses représentants avec une ressource fiscale gérée pour les besoins de la Corse, est envisageable et souhaitable. Mais passer de rien à un tout, qui va nous spolier et nous mettre à genoux d’un point de vue économique et patrimonial, n’est pas envisageable.
- Que voulez-vous signifier à travers cette nouvelle motion ?
- Qu’il faut aller au bout de la logique politique et jouer cartes sur table. Ce que l’on voit poindre à travers la question fiscale, la question du foncier et de la langue, c’est la tentation de la manœuvre de la part de la classe politique traditionnelle en Corse et de Paris.
- Quel est l’intérêt de cette manœuvre ?
- A un moment donné, la classe politique traditionnelle, à gauche comme à droite, a pris en compte un certain nombre de revendications qui, historiquement, sont portées par les nationalistes et qui, aujourd’hui, sont partagées par un très grand nombre de Corses. Mais, elle les a prises en compte par rapport à notre poids politique et électoral. Notre crainte, malheureusement alimentée par un certain nombre d’éléments, c’est que la classe politique joue la montre. Elle nous demande de travailler, ce que nous nous faisons. Nous avançons des propositions et, au moment de leur concrétisation, on nous dit, sans nous le dire vraiment, que ces propositions sont inconstitutionnelles et qu’on ne peut pas changer la constitution. Nous travaillons pour rien, nous perdons du temps par rapport à l’intérêt de la Corse, mais la classe politique traditionnelle, à gauche comme à droite, gagne du temps.
- Etes-vous en train de dire que cette classe politique vous laisse travailler par opportunité électorale mais sans réelle volonté politique ?
- Bien sûr. Il n’y a pas de volonté politique de changer les choses. La volonté politique d’aller au bout de cette logique de changement et de défense des intérêts de la Corse et des Corses, c’est nous qui la portons. La co-officialité de la langue a été votée à la CTC, y compris par la majorité de gauche. La mettre en œuvre implique une réforme de la constitutionalité. Donc, la gauche devrait dire haut et fort à son représentant à l’élection présidentielle et à travers ses candidats aux législatives qu’elle est pour une loi organisant la co-officialité de la langue corse. Cette loi, pour être constitutionnelle, demande une révision de la constitution, la gauche doit s’engager à faire cette révision. Ce discours-là n’est pas tenu. Nous sommes les seuls à le tenir. Donc, nous disons aux Corses : Ne vous faites pas abuser. Si vous voulez que les grands chantiers engagés soient menés à leur terme, en matière de fiscalité, de défense de la langue et de la terre, que des mesures fortes soient prises, il faut nous donner les moyens de peser politiquement et de gagner !
- Pourquoi la classe politique traditionnelle ne s’engage-t-elle pas sur un problème qui concerne directement le porte-monnaie et le patrimoine des Corses ?
- Elle s’est engagée sous l’aiguillon de notre présence constante. Mais, le principe de la suppression de notre régime fiscal historique, voté en 2002 et engagé au lendemain de l’assassinat du Préfet Erignac, a été soutenu par des parlementaires de gauche et de droite. Depuis lors, quelque ait été la majorité à Paris, les députés appartenant à cette majorité n’ont jamais pu, ni tenté d’obtenir de leur propre majorité des mesures fortes et pérennes. C’est la raison pour laquelle nous disons qu’avec des députés nationalistes, les Corses auront la garantie que ces problèmes-là seront portés et que les solutions que nous avons faites validées par le peuple seront défendues. Nous serons entendus, quelque soit la majorité, parce l’élection d’un ou plusieurs députés nationalistes aura un poids politique tel que Paris sera obligée de prendre en compte nos revendications de loi et de modification de la constitution.
- Mais le député élu ne disposera que de 4 mois pour faire voter la loi. N’est-ce pas impossible ?
- C’est possible. Si on met bout à bout toutes ces contraintes de calendrier et toutes ces urgences qui s’additionnent, on se rend compte que tous les prochains rendez-vous électoraux et politiques sont décisifs. Dans le domaine du foncier, de la fiscalité, de la langue, de l‘économie, de la formation, on ne peut plus se permettre de perdre du temps.
- Qu’attendez-vous de la CTC avec cette motion ?
- Un vote massif qui serait un signal politique très fort de la part de la CTC, de cohérence vis-à-vis de ses propres délibérations et de prise en compte de l’urgence de la situation. Qu’ensuite, elle interpelle les autres niveaux de pouvoir, notamment présidentiel et parlementaire, afin que les mesures dictées par le calendrier soient prises en temps et en heure.
Propos recueillis par Nicole MARI
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FIAT LUX (samedi, 21 avril 2012 07:29)
bon courage je vous soutiens et beaucoup de travail.
Zenobia Mullins (mardi, 31 janvier 2017 09:34)
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