Déjà numéro deux sur la liste menée par Tony Cardi aux Territoriales, candidate aux dernières cantonales dans le canton de Prunelli-di-Fiumorbu, Estelle Massoni porte, sans complexe, les couleurs Rassemblement Bleu Marine dans la 2ème circonscription de Haute-Corse. Agée de 26 ans, responsable de la structure FN Jeunesse corse, c'est une des rares femmes engagées dans la campagne. Elle explique, à Corse Net Infos, qu'elle représente la seule véritable opposition au système en place et se positionne sur tous les sujets qui font débat en Corse.
- Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans cette campagne législative ?
- Nous souhaitons profiter de l’engouement des 40 000 électeurs, soit 25 %, qui se sont rassemblés en Corse autour du projet de Marine Le Pen, d’abord pour nous implanter localement. Ensuite, pour montrer les nouveaux visages du FN, présenter le projet national et local et donner une véritable opposition aux partis du système, à la gauche au pouvoir. Notre but est de mettre en place les idées patriotiques au sein de l’Assemblée nationale pour faire capoter les plans d’austérité qui sévissent en Europe, comme l'ont fait les Pays-Bas. Pas grand monde le dit, mais 80 % des décisions sont prises à Bruxelles, nous ne sommes plus maîtres de nos décisions. C’est important que le peuple retrouve la maîtrise de son avenir.
- Sur quels thèmes ferez-vous campagne ? Des thèmes nationaux ou locaux ?
- C’est une élection avant tout nationale, donc nous développons le projet national de Marine Le Pen, à savoir le patriotisme économique et social, l'arrêt de l’immigration, la préférence nationale, le refus des plans d’austérité et des marchés financiers, le soutien massif aux TPE, PME et PMI pour relancer l’emploi. Nous souhaitons aussi défendre nos spécificités locales à travers le programme que Marine Le Pen a dévoilé lors de sa venue à Ajaccio.
- En quoi consiste votre programme local ?
- En Corse, nous avons une forte identité. Nous souhaitons la conserver, maintenir les Arrêtés Miot pour préserver le patrimoine des Corses, faire en sorte qu’il ne s’évapore pas comme c’est le cas aujourd’hui. Revitaliser les villages, protéger le foncier, défendre l’agriculture qui se meurt et les services publics, notamment dans la 2ème circonscription où les services de proximité sont délités par toutes les directives européennes votées depuis 1992 par l'UMP et le PS. Nous sommes favorables à la signature de la Charte des langues régionales.
- Mais pas des langues minoritaires ?
- Non. Nous souhaitons établir une charte des langues régionales, mais non minoritaires, que nous, les Corses, proposerons. D’une part, nous ne voulons pas nous soumettre aux desiderata de Bruxelles. D’autre part, nous pensons que la langue corse est une langue à part entière et qu’elle doit être considérée à sa juste valeur. Il faut développer l’enseignement de la langue et de l’histoire de la Corse autour de cette charte régionale.
- Etes-vous, pour autant, favorable à la co-officialité ?
- Il faut savoir d’abord dans quel cadre la langue sera officialisée, quel sera le coût au niveau de la traduction, les enjeux et les répercutions, bonnes et mauvaises. Il faut être clair là-dessus. Nous considérons que la seule structure, aujourd’hui, à même de protéger notre identité, notre langue, notre économie, nos emplois, notre avenir… c’est le cadre national. La langue se perd dans l’effacement des identités, provoqué volontairement par le mondialisation. Il faut défendre la langue corse en l’enseignant dès le plus jeune âge, sans oublier évidemment notre langue maternelle qui est le Français. En poursuivant les efforts, en en faisant davantage s’ils ne suffisent pas, en signant une charte des langues régionales non minoritaires, nous pourrons permettre la survie de la langue.
- Vous parlez aussi de la défense des Arrêtés Miot et du foncier ?
- C’est un gros problème. Ne pas les maintenir serait très néfaste. Les villages vont encore plus se vider alors qu’il faut les revitaliser et y amener de l’emploi. Il faut une politique d’incitation à la préservation du patrimoine pour ne pas voir une Corse où tout est à vendre et tout est à acheter.
- C’est-à-dire ?
- Nous sommes favorables à la mise en place d’un chèque Premier logement en fonction des ressources du foyer pour permettre aux jeunes, notamment, d'accéder à la propriété. L’Etat verserait ce chèque sous forme de crédit d’impôt, qui permettrait vraiment l’accès à la propriété parce que toutes les mesurettes prises par l’UMPS n’ont abouti à rien. En amont, le problème fondamental est celui de la préférence nationale d’accès à l’emploi, au logement et à l’aide sociale qu’il va bien falloir mettre en place, à un moment donné. En France, un million de personnes attend un logement et ne va plus supporter d’attendre.
- Avec cette préférence nationale, ne rejoignez-vous pas les nationalistes qui militent pour le statut de résident ?
- Le statut de résident implique la citoyenneté corse. Je suis contre parce que la nation est une et indivisible. Il y a, chez les nationalistes, une incohérence : ils sont européistes, mais souhaitent mettre en place ce type de statut qui va à l’encontre des Accords de Schengen sur la libre circulation des hommes. Ensuite, il serait intéressant de voir ce que la citoyenneté corse offrirait aux étrangers, communautaires ou non, qui ont dix ans de résidence dans l’île. C'est un problème fondamental. Depuis 40 ans, nous avons fait rentrer des sans-papiers pour faire baisser les salaires, aujourd’hui, pour les mener au chômage vu qu’il n’y a plus d’emploi. Nous ne savons même pas leur nombre. La citoyenneté corse amènera, automatiquement, la régularisation des sans-papiers, le droit de vote et l’éligibilité aux élections locales, c’est un peu contradictoire ! Pour la protection du patrimoine des Corses, dans la situation difficile que nous vivons, on ne peut appliquer ce genre de disposition.
- L'assemblée de Corse travaille sur le transfert de la compétence législative. Quelle est votre position ?
- Philippe Séguin disait que la décentralisation coûtait terriblement cher. Elle a été très mal faite et trop rapide. Elle a, un peu, recréé l'époque des féodalités par le clientélisme, par une embauche considérable, des dépenses de fonctionnement totalement inutiles alors que nos compatriotes sont en situation de grande précarité. Cela a un coût qui se répercute sur le contribuable. L'argent de la décentralisation a été gaspillé dans toutes les régions tenues par la gauche qui sont aujourd'hui des ruines, alors que nous pourrions investir massivement, aider des tas de métiers qui sont dans le rouge et tant de gens dans le besoin. On ne le fait pas. Marine Le Pen proposait une baisse des dotations de 2% aux collectivités et aux régions, une baisse récupérée en faisant des économies de fonctionnement. C'est pour cela que transférer la compétence législative et fiscale à la Corse n'est pas une bonne initiative car elle apportera plus de dépenses anormales et plus de gaspillage.
- La Ligue des droits de l'homme a refusé de vous transmettre le questionnaire qu'elle a adressé aux autres candidats. Comment réagissez-vous ?
- On a l'habitude. Quand on est défenseur de la Ligue des droits de l'Homme, on ne doit oublier aucun parti, même ceux qui ne sont pas en accord avec nos idées. La démocratie, c'est écouter tout le monde. Mr Pacou met de côté 40000 électeurs corses et 18% d'électeurs français. Il dit que nous sommes anti-républicains, contre la régularisation des sans-papiers. Je lui réponds que nous sommes, peut-être, les seuls défenseurs des immigrés, car nous leur avons toujours dit que nous n'avons plus les moyens de les accueillir. On mène ces gens au chômage au lieu de les aider chez eux. Ces responsables devraient montrer l'exemple et ouvrir les portes de leur domicile avant celles des Corses puisque charité bien ordonnée commence par le sacrifice de soi-même !
- Quelle serait, selon vous, la priorité du député élu dans la 2ème circonscription de Haute Corse ?
- Le plus important, c'est l'emploi. Même si la défense de l'identité est importante. Je m'occupe des jeunes et j'en rencontre de plus en plus qui sont en situation de précarité, qui ne trouvent pas d'emploi, qui n'ont pas un parent ou un ami bien placé pour les faire rentrer dans la fonction publique ou ailleurs. Une fois leurs études terminées, ils se retrouvent au chômage.
- Quel score espérez-vous réaliser aux législatives ?
- Notre score local va évoluer. Mais il est évident que nous allons perdre une grande partie de notre électorat dans le clientélisme. Mais nous nous battons pour nos convictions. L'essentiel est de faire passer le message, de faire un score meilleur qu'aux précédents scrutins locaux afin de démarrer les prochaines échéances électorales dans de très bonnes conditions et nous implanter localement.
Propos recueillis par Nicole MARI
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