Sensibiliser les enfants, mais aussi le grand public, à la protection et à la sauvegarde du patrimoine naturel insulaire est l’une des missions éducatives de l'Office de l'environnement de la Corse. Cette mission pédagogique lui permet d’engager un certain d’actions et de manifestations, telle que CAP MER qui s'est tenu jeudi et vendredi à Saint-Florent avec les élèves des écoles primaires du Nebbio. Explications, pour Corse Net Infos, de Joseph Salvini, chef département éducation à l'Office de l'environnement.
- Pourquoi l’Office de l’environnement a-t-il engagé cette mission de sensibilisation ?
- La réponse est dans l’intitulé de CAP MER, qui signifie : Connaître, Aimer et Protéger la mer. Pour bien protéger, il faut d’abord connaître et ensuite apprendre à aimer. Le but du travail de sensibilisation, que nous menons toute l’année, est d’arriver à ce que les futures générations puissent protéger, ou du moins respecter et apprendre à connaître leur environnement. Cet effort pédagogique ne touche pas seulement le milieu marin, mais tous les milieux du patrimoine naturel et culturel de la Corse.
- Qu’entendez-vous par culturel ?
- Tout ce qui concerne le patrimoine bâti traditionnel de nos villages, qui avait la vocation d’utiliser les ressources. Par exemple, l’eau avec les fontaines et les lavoirs. L’une des missions de l’Office de l’environnement est d’expliquer comment ce patrimoine a été conçu, quels étaient ses usages et pourquoi il est utile aujourd’hui de le préserver. Les actions de l'Office sont diverses : patrimoine. agriculture biologique, milieu marin, faune, notamment les oiseaux et les chauve-souris, cours d’eau avec la rivière, modes de gestion du patrimoine, risques incendie et inondation...
- Comment se traduit concrètement cet effort pédagogique ?
- Un certain nombre de programmes sont mis en œuvre avec le concours des associations, qui sont des relais de terrain incontournables. L’Office répond aussi à des demandes d’aides émanant de collectivités, d’écoles, de collèges et de lycées pour les scolaires. Il s’associe également à des manifestations menées en direction du grand public, soit dans le cadre européen, soit dans le cadre d’opérations continues. CAP MER en est un exemple.
- Quels sont les programmes phares mis en œuvre ?
- D’abord, le Programme Ecole de la Mer de sensibilisation au milieu marin, qui touche la Corse entière et une soixantaine de classes primaires par an. Il se décline en 11 séances, à la fois en classe et sur le terrain, assurées par des associations partenaires. Ce programme a été étendu à l’observation des cétacés, mais, pour l’instant, uniquement sur le secteur du Grand Ajaccio. D’autres programmes portent sur la rivière et la connaissance du milieu d’eau douce, sur les risques majeurs avec les volets incendie et inondation, et sur l’agriculture biologique.
- Pourquoi l’agriculture biologique ?
- Parce qu’elle a une valeur environnementale par rapport à l’agriculture traditionnelle. Depuis 2007, nous avons mis en place une convention avec une association d’agriculteurs qui reçoivent sur leur exploitation des enfants et leur expliquent leur mode de fonctionnement. Ce programme concerne 25 classes par an.
- D’autres programmes sont-ils développés ?
- Nous développons aussi un programme sur le patrimoine ancien bâti, notamment sur la Haute-Corse en partenariat avec le Conseil d’architecture, d’urbanisme et de développement. D’autres programmes plus petits sont menés avec des associations, notamment le CPIE de Corte-Centre Balagne-association A Rinascita. Nous soutenons aussi un grand nombre de manifestations initiées par ces associations. Par exemple, nous sommes partenaires fondateurs de l’opération Mer en Fête organisée par l’association U Marinu. Nous aidons de manière plus ponctuelle les écoles ou les collèges qui montent des projets. Nous soutenons la classe Environnement du collège d’Ile-Rousse qui est basée sur le volontariat des élèves et qui fait, chaque année, des opérations de développement durable.
- Pourquoi focaliser cet effort de sensibilisation vers les enfants ?
- Nous misons sur les générations futures. PLes enfants sont les meilleurs ambassadeurs dans leur famille auprès des générations plus âgées. Quand on touche les enfants, on touche souvent deux publics, ce qui n'est pas forcément le cas quand on touche directement les adultes qui ne relayent pas forcément l'information. Par contre, nous utilisons un certain nombre d'opérations, notamment CAP MER, pour sensibiliser le grand public. Par ailleurs, dans le cadre de programmes européens ou autres, l'office de l'environnement de la Corse édite des documents de sensibilisation à destination du grand public.
- Quels types de documents ?
- Par exemple, des cartes marines de protection des espaces marins mises à disposition dans les offices de tourisme et les capitaineries des ports. Le but est de sensibiliser les plaisanciers sur les endroits à risque, les endroits protégés, les réserves, les zones de cantonnement de pêche... Dans le cadre tourisme/sport/environnement, nous avons mis en place des cartes éco-gestes. Nous montons également un certain nombre d'exposition sur le patrimoine bâti traditionnel lié à l'eau ou sur la faune sauvage, notamment le mouflon et le gypaète, en partenariat avec le Parc régional. Nous éditons des documents de sensibilisation disponibles dans les maisons de la nature, les offices de tourisme, etc.
- Pouvez-vous évaluer l'impact de ces opérations sur le terrain ?
- C'est très difficile. Nous voyons, à travers les générations d'enfants que nous arrivons à sensibiliser, notamment sur le milieu marin, qu'une connaissance de ce milieu commence à émerger. Par contre, nous avons un outil d'évaluation des politiques de tri sélectif ou de la campagne sur les sacs plastiques mises en place. Nous menons une enquête tous les 2 ou 3 ans sur la gestion des macro-déchets par les communes littorales au niveau des plages. Il apparaît clairement que la quantité ramassée de sacs plastique est bien moindre qu'il y a 20 ans.
- Les gens ont-ils, selon vous, changé leurs comportements ?
- Je le pense. Ils sont de plus en plus réceptifs. Tout le monde disait que mettre en place le tri sélectif serait difficile parce que nous n'avons pas toujours été des modèles en matière de déchets. Or, depuis 20 ans, nous constatons des différences notables de comportement. Les décharges sauvages existent toujours, mais elles n'ont plus besoin d'être systématiquement réhabilitées.
- Est-ce à dire que les Corses ont pris conscience de cette nécessité de préserver le patrimoine unique de l'île ?
- Tout à fait. Ils ont, de plus en plus, conscience, depuis une dizaine d'années, que les pollutions touchent aussi l'île que l'on croyait préservée de tout, et donc de la valeur écologique du milieu dans lequel ils vivent. Même si nous subissons les dégâts occasionnés dans le Golfe de Gènes ou autour de l'étang de Berre avec des pollutions aériennes au niveau de la qualité de l'air et maritimes, la Corse est l'île la mieux protégée de Méditerranée en termes de réserves, etc. Cet effort est fait non seulement pour éviter les abus, mais aussi parce que l'écologie et le patrimoine sont des facteurs importants de ressources économiques.
- Que reste-t-il à faire ?
- Il faut améliorer. En matière de sensibilisation, le grand public, les adultes sont trop négligés, or ce sont eux qui mettent en oeuvre les actions et les politiques. Il faut faire comprendre aux élus et aux sociaux-professionnels les enjeux à moyen et long terme. C'est ce que nous faisons sur la pêche en parlant de la gestion de la ressource. Nombre d'adultes n'ont pas conscience des enjeux et ne connaissent pas le milieu dans lequel ils vivent, ni la valeur de leur patrimoine. Dés qu'ils en prennent conscience, ils sont plus attentifs. Mais il reste encore beaucoup de travail à faire de ce côté-là.
Propos recueillis par Nicole MARI
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Catherine (dimanche, 09 septembre 2012 17:06)
Sensibiliser le grand public est primordial. Nos ressources naturelles en Corse ont été très dévalorisées ces dernières années.