Une nouvelle exposition a été inaugurée au Musée Fesch, palais des expositions d’Ajaccio. Intitulée Vrai ? Faux ? Le primitif italien était presque parfait, elle propose de faire découvrir au public le goût pour les primitifs italiens, depuis leur « découverte » au XVIIIème siècle jusqu’aux faux, jusqu'au 1er octobre 2012.
Une conférence sur tableaux, dirigée par Esther Moench, Commissaire de l’exposition et Conservateur du patrimoine honoraire a permis une réflexion sur l’œuvre et son double, sur le détournement des images, mais aussi sur les copies, répliques et pastiches, que l’on retrouve dans la peinture dès le moyen âge et durant toute la période de la Renaissance.
Le Palais Fesch-musée des Beaux-Arts rayonne surtout par ses collections italiennes du XVIIe siècle. La passion du cardinal Fesch, son goût précoce pour les Primitifs italiens lui firent jouer un rôle important sur l’évolution du goût, par la mise en vente en 1845 à Rome d’un nombre impressionnant de ces tableaux.
Cet intérêt nouveau, un peu timide et limité dans un premier temps à quelques érudits, se transforme au fil du XIXe siècle en un engouement tel que le phénomène des falsifications explose dans les dernières décennies.
Dans les ateliers italiens de la Renaissance, le phénomène de la copie se joue comme un véritable exercice de style : le maître crée, l’élève copie.
À la fin du XVe siècle, les ateliers florentins de Botticelli, Lorenzo di Credi et Ghirlandaio, présents dans cette exposition, produisent des originaux multiples.
Au XIXe siècle, l’engouement rapide pour les Primitifs italiens, le démembrement de nombreux grands retables, incitent marchands et collectionneurs à transformer les œuvres, à réinventer leur contexte ou à les dévoyer. Le Primitif se met alors au service du décoratif et du commercial.
Les métamorphoses peuvent ainsi aller d’un simple maquillage, on repeint ce qui gêne ou est abîmé, à de véritables détournements d’usage, comme ces panneaux de plafond lombard du XVe siècle transformés en portrait indépendant, voire en porte-manteau !
Toutes les conditions sont désormais réunies pour que s’ouvre l’ère des falsifications : le succès des Primitifs, un marché de l’art bien organisé, une demande croissante des grands collectionneurs (en particulier américains, dès la fin du XIXe siècle), ont sans doute stimulé restaurateurs et marchands dans la production de faux. Qu’il s’agisse de copies fidèles d’œuvres existantes (Margaritone d’Arezzo, Orcagna, Benozzo Gozzoli, Domenico Ghirlandaio) ou de collages à partir d’éléments puisés dans un vaste répertoire (Duccio, Pietro Lorenzetti), certains de ces tableaux parviennent à duper les plus grands experts, dont l’éminent critique américain Bernard Berenson.
Esther Moench, commissaire de l’exposition, a assuré durant près de vingt ans la direction du musée du Petit Palais d’Avignon, connu pour abriter la collection de Primitifs italiens du marquis Giampietro Campana, l’une des plus importantes en Europe.
Le comité scientifique est composé de Philippe Costamagna, Michel Laclotte, Élisabeth Mognetti, Dominique Thiébaut et Nathalie Volle.
Cette exposition, réalisée en partenariat avec l’Institut National d’Histoire
de l’art de Paris, s’est largement appuyée sur le programme du RETIF, un inventaire en cours des peintures italiennes dans les collections publiques françaises lancé à l’heureuse initiative de Michel Laclotte, Président honoraire du musée du Louvre.
Elle bénéficie aussi d’une collaboration privilégiée avec le Centre de Recherches et de Restauration des musées de France, et le Centre Interrégional de Conservation et Restauration du Patrimoine de Marseille. Elle a pu être organisée grâce à la Ville d’Ajaccio et au soutien de la Collectivité Territoriale de Corse.
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