La deuxième mouture du Padduc a été présentée, jeudi, par la conseillère exécutive, Maria Guidicelli, aux élus de l'Assemblée de Corse. Après le retrait brutal, en juin 2009, par Ange Santini, alors président du conseil exécutif, de la première version très controversée, le Padduc 2ème génération présente un modèle de développement alternatif très différent, symbolique de la nouvelle politique territoriale.
C'est le dossier majeur de la mandature avec celui, corollaire, de l'évolution institutionnelle. Et c'est, de l'avis de tous, un acte éminemment politique puisqu'il s'agit, ni plus, ni moins, de définir, voire d'inventer un nouveau modèle de développement. La CTC est la seule collectivité de l'hexagone à y être astreinte par une loi de janvier 2002. Ce sera la première fois que la Corse décidera, elle-même, de son schéma de développement et d'aménagement qui, jusqu'à présent, lui a toujours été imposé par l'Etat. C'est dire si l'élaboration du Plan d'Aménagement et de Développement Durable de la Corse (PADDUC) 2ème génération tient de la gageure sur fond d'urgences économiques et sociales.
Une première étape
Jeudi, a été examiné le premier rapport sur les grandes orientations qui vont sous-tendre le futur document de référence pour les 30 prochaines années, rapport représentant la première étape obligée du processus d'élaboration qui devrait s'étaler sur plusieurs mois. Une ossature générale, présentée par Maria Guidicelli, conseillère exécutive en charge du PADDUC et élue du Front de gauche, qui se veut symbolique des valeurs clés de la nouvelle politique territoriale. Un document ambitieux qui intègre les grands sujets en discussion à la CTC depuis le début de cette mandature : langue, identité, foncier, statut de résident, évolution des institutions, etc. Et pose une question essentielle : le PADDUC, pour quoi ? Pour qui ? En d'autres termes, quel modèle de développement pour quelle société ?
Un choix de société
"Un société de progrès basée sur la solidarité qui est la valeur que nous avons décidée de mettre au coeur de ce projet" répond, en substance, Maria Guidicelli qui considère que la Corse est "à un tournant de son histoire". Elle propose un modèle "alternatif" complètement différent de celui que l'île connaît actuellement et qui prône "un développement productif, solidaire et partagé" qui devra être conçu "en écho aux aspirations populaires". La CTC a d'ailleurs lancé une vaste enquête grand public, via un questionnaire en ligne ou papier qui a déjà récolté 2200 réponses qui expriment globalement un souci de solidarité et de justice sociale.
La conseillère exécutive dresse, ensuite, un constat accablant, de la situation insulaire minée par une précarité élevée, un chômage en hausse, une production étique et une croissance artificielle basée sur des rentes de situation. Un système, estime-t-elle, source de risques majeurs. "Il n’y a pas de fatalité en la matière, et il est donc tout à fait possible de se détourner des processus d’assistanat qui stérilisent les initiatives", poursuit-elle.
Un changement radical
Fort de ce constat, le rapport préconise un changement radical de société et la mise en place d'une nouvelle gouvernance.
L'idée du nouveau plan est de "passer de l'économie de l'avoir plus à l'économie de l'être mieux" en s'appuyant sur la "valorisation de nos capitaux humains et naturels". Il table sur l'essor d'une nouvelle économie axée sur "la transition écologique", créatrice de richesses et d'emplois. Trois leviers stratégiques sont privilégiés pour un développement durable : le maintien des services publics, particulièrement en milieu rural, l’encouragement à la création d’activité et la solidarité entre les territoires. Trois principes fondateurs sont réaffirmés : la redéfinition du contenu des lois littoral et montagne, l'importance de la cartographie et l'identification des espaces stratégiques. Maria Guidicelli affirme, également, la nécessité de rééquilibrer le territoire et de développer l’économie solidaire tout en valorisant l’identité, la culture et la langue. Elle confirme la réflexion autour de la création d’une monnaie complémentaire pour favoriser les échanges.
Une nouvelle gouvernance
Puis, elle pose la question des moyens qui vont s'articuler autour de deux pôles : " le potentiel humain comme ressource première du développement et le statut spécifique comme moteur du développement". Avec trois points forts : la responsabilisation des acteurs économiques, la gestion autonome et durable du territoire, la maîtrise des risques.
Reprenant la notion de "peuple corse" mais dans une connotation sociale, Maria Guidicelli engage la réflexion d'une évolution institutionnelle et statuaire avec transfert des compétences pour une nouvelle gouvernance fondée sur l'autodétermination.
Une présentation exhaustive qui s'est achevée, fait inhabituel, sous les applaudissements des élus de tous bords qui ont exprimé, ainsi, leur satisfaction pour la manière dont la conseillère exécutive a conduit jusqu'ici ce dossier.
Des concepts critiqués
S'en est suivi un long débat de 6 heures où un consensus s'est globalement dégagé, malgré quelques bémols idéologiques de l'opposition de droite et du groupe de la Gauche républicaine. L'élu UMP Jean Jacques Panunzi ne s'est pas gêné pour éreinter "ce fameux modèle de société alternatif dont la plupart des pistes sont attendues" et sont le port-voix "des thèses gauchistes radicales et altermondialistes". La droite a, également, émis des réserves sur l'amalgame PADDUC/évolution institutionnelle dont elle ne voit pas la nécessité. Mais les plus importantes critiques seront apportées par Pasqualine Castellani, de la Gauche républicaine, qui va interpeller le Conseil exécutif sur les orientations politiques mises en avant. "Ce rapport est sous-tendu par des concepts qui nous sont totalement étrangers". Elle ne se prive pas de fustiger "les références à la violence d'Etat, à la parité de la langue et au contingentement des résidences secondaires", contenues dans le rapport. Son groupe déposera 4 amendements.
Un consensus arraché
Pour leur part, les élus nationalistes ne pouvaient qu'apprécier globalement un document qui reprend tous leurs fondamentaux et affiche une vision autonomiste qu'ils ne peuvent renier. Le groupe Femu a Corsica a néanmoins déposé pas moins de 22 amendements, notamment sur l'insertion d'un préambule affirmant "l'existence du peuple corse, communauté historique et culturelle vivante, regroupant les Corses d'origine et les Corses d'adoption". Au final, après une discussion serrée sur la trentaine d'amendements, l'exécutif a finalement arraché le consensus souhaité, même sur la notion de peuple corse, et le rapport a été adopté, moins les voix de la droite qui s'est abstenue.
N. M.
Écrire commentaire
Paolinu (vendredi, 27 juillet 2012 11:14)
L'anzianu Padduc di Rocca sera Santini, quellu di a bettonizazione e di a francisata hè statu sciappatu e rimpiazatu da unu duve a tematica di fondu hè serve l'interessi di u populu corsu! Que ghjè una bella vittoria nant'a i republicani anti corsi!!!
querci (vendredi, 27 juillet 2012 14:22)
bon travail .cela change du premier.