Le vote, par l’Assemblée de Corse, vendredi dernier, du cahier des charges de la future Délégation de service public (DSP) maritime a été un profond soulagement pour le président de l'Office des transports. Paul-Marie Bartoli a été, néanmoins, contraint d'accepter un rapport largement amendé et de renoncer à son dada, le service garanti. Il affirme, à Corse Net Infos, assumer pleinement ses choix et croire en l'avenir de la SNCM.
- Que vous inspire votre rapport très largement amendé ?
- Amendé, notamment par moi-même ! Egalement par les autres groupes. C'est un rapport abouti. Je l'avais qualifié d'ouvert, de perfectible et de courageux. Courageux, il l'est, puisqu'il définit enfin, et c'est la première fois, un périmètre de DSP qui répond uniquement aux besoins de la Corse. C'est pour cela que nous avons été mandatés par la population quand elle nous a portés aux responsabilités à la CTC.
- Quel est votre sentiment sur le vote qui a permis son adoption ?
- Aucun triomphalisme, bien entendu ! Il reste beaucoup de chemin à parcourir, notamment de mener la négociation avec les éventuels candidats et surtout, préalablement, de rédiger des Obligations de service public (OSP). Des OSP qui tiennent la route et qui permettent de faire en sorte que la Corse n'ait plus une desserte maritime tumultueuse, mais fiable sur le long terme.
- Regrettez-vous l'abandon de l'extension de la DSP à Toulon ?
- Je pense que nous aurions pu aller à Toulon, mais sous certaines conditions qui n'étaient pas remplies. Nous avons voulu écarter les risques de contentieux. Aujourd'hui, la Corse a besoin d'un service maritime qui soit garanti pendant les 10 prochaines années. C'est ce à quoi je vais essayer d'aboutir lors des négociations avec les éventuels candidats.
-Vous avez été contraint de retirer votre amendement sur le service garanti. Dans quel état d'esprit êtes-vous ?
- Je suis souvent accusé de dérives droitières, mais j'assume mes choix. Je reste persuadé que l'île ne doit pas être bloquée. Le droit de grève est un droit constitutionnel qu'il ne faut pas fouler aux pieds, mais quand on fait du service public dans une région vulnérable comme une île, il faut un service garanti qui va même au-delà de ce que certains appellent le service minimum.
- Pourquoi, donc, l'avoir retiré ?
- J'ai compris qu'il était difficile aux futurs opérateurs, quelqu'ils soient, d'obtenir de leurs salariés ce service garanti qui n'était pas excessif. Il était même en retrait par rapport au service minimum en vigueur et signé par tous les syndicats de notre compagnie régionale aérienne, Air Corsica. Mais il faut toujours revenir au principe de réalité. J'ai considéré, dans la matinée de vendredi et en cours de séance, que même si je réussissais à imposer majoritairement cet amendement, il n'aurait pas pu prospérer si les organisations syndicales ne l'avaient pas accepté.
- Pourquoi avoir soutenu le service social et solidaire prôné par Corsica libera ?
- En voyant le sous-amendement déposé par Corsica Libera, j'ai compris que c'était une avancée considérable que je ne pouvais pas balayer d'un revers de manche. Je l'ai faite approuver en mon nom et au nom du Conseil Exécutif. Je suis même intervenu en Commission, lors de la suspension de séance, pour dire que nous étions favorables à cet amendement sous-amendé.
- On accuse ce cahier des charges d'être très libéral et favorable à Corsica Ferries. Que répondez-vous ?
- Il ne faut jamais être excessif. Je comprends qu'il y ait eu des problèmes de gouvernance au sein de la SNCM ces dernières années, mais on ne peut pas rendre la CTC responsable des erreurs qui ont pu être commises, soit pas l'Etat quand il était le patron de la SNCM, soit par l'actionnaire principal aujourd'hui. Je le dis clairement et distinctement : la Corse a besoin de la SNCM qui fait travailler beaucoup de PME insulaires. Mais, il appartient à la SNCM de faire sa révolution, au sens noble du terme.
- C'est-à-dire ?
- C'est-à-dire d'avoir un vrai projet d'entreprise. Si la SNCM répond à l'appel d'offres dans de bonnes conditions, comme elle l'a fait par le passé avec la CMN, sans faire de délit de favoritisme, son offre sera étudiée en toute impartialité comme celle des autres compagnies. Il y a un avenir pour la SNCM dans la DSP et hors de la DSP à condition de bien vouloir faire l'effort suffisant de management avec des ressources humaines enfin apaisées.
- Ce rapport est voté. Que va-t-il se passer maintenant ?
- Un avis d'appel à candidatures va être lancé, comme le veut la procédure. Nous allons voir quelles compagnies maritimes vont faire une offre, puis analyser ces offres dans le cadre de la Commission de la DSP. Cette procédure va durer quelques mois. Ensuite, je reviendrai devant l'Assemblée avec un rapport abouti.
- A quelle date débute officiellement la nouvelle DSP ? En juin 2013 ?
- Par anticipation, elle pourra être commercialisée à partir du 1er juin 2013, mais elle débutera, en réalité, le 1er janvier 2014.
- Quand est prévu le débat sur les OSP ?
- A la prochaine session des 8 et 9 novembre, il est impératif que nous adoptions des OSP qui permettent, justement, d'éviter des concurrences déloyales et des distorsions de concurrence. Les OSP devront garantir le service public dont la Corse a besoin.
Propos recueillis par Nicole MARI
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